Un récit initiatique.

En corrélation avec le phénomène ovni et extraterrestres, voici quelques courts extraits de la nouvelle du grand Herbert George Wells "La porte dans le mur", tirée du recueil "Le pays des aveugles", copyright Éditions du Mercure de France, 1914.

L'idée qui jaillit de cette nouvelle extraordinaire est la plus importante au monde : LE RÊVE. (Puisque nous avons chuté dans la matière)

Dans cette nouvelle écrite en 1914, il s'agit de l'histoire de Lionel Wallace (les parenthèses sont de moi) :

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C'est au collège que je l'entendis (Lionel Wallace) parler pour la première fois de "la porte dans le mur", dont il devait m'entretenir une seconde et dernière fois, un mois à peine avant sa mort.
Pour lui, cette porte dans le mur était une porte véritable, menant, à travers un mur véritable, vers les réalités immortelles.
Elle apparut dans sa vie de très bonne heure, quand il n'était qu'un bambin de cinq ou six ans. je me rappelle de quel ton lent et grave il me précisa la date.
- Une vigne vierge cramoisie la recouvrait, - décrivait-il, - une seule belle teinte cramoisie, sur une tache ambrée de clair soleil, contre un mur blanc. Ces détails se confondaient dans l'impression d'ensemble, sans que je m'en fusse rendu compte, et, devant la porte verte, le trottoir était parsemé de feuilles de marronnier, tachetées de jaune, ni rousses ni sales, mais fraîchement tombées... ce qui indique que c'était en octobre... J'observe tous les ans les marronniers, et je ne me trompe pas.. Autant que je puis en être sûr, je devais avoir cinq ans et quatre mois.
Enfant assez précoce, ajouta-t-il, - il sut parler bien avant l'âge habituel, - il se montrait si sage, si "raisonnable", comme on dit, qu'on lui accordait plus de liberté qu'on n'en laisse généralement aux enfants de quelques années plus âgés.

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Wallace me décrit avec la plus extrême minutie ces moments d'hésitation.
Il passa droit devant la porte ; puis, les mains dans ses poches, et s'efforçant de siffloter, il continua jusqu'à l'extrémité du mur. A cet endroit commençait une rangée de boutiques sordides, entre lesquelles se distinguait celle du plombier, avec ses vitrines pleines d'un poussiéreux amas de tubes et de conduites en poterie, de feuilles de plomb, de robinets et de pots de vernis. Il s'arrêta en feignant de prendre grand intérêt à ce désordre, mais en guettant d'un désir passionné la porte verte.
Alors une rafale d'émotion l'emporta. de peur d'être agrippé à nouveau par l'hésitation, il se lança à toutes jambes, poussa de ses deux mains ouvertes la porte convoitée, et la laissa se refermer d'elle-même derrière lui. C'est ainsi qu'en un clin d'œil il pénétra dans le jardin dont le souvenir devait le hanter toute sa vie. (Sorte de Paradis ou jardin d'Imhotep)

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Il y avait, dans l'air même qu'on y respirait, quelque chose d'exhilarant qui vous imprégnait d'une sensation de légèreté et de bien-être ; tout y revêtait un aspect riant, immaculé et subtilement lumineux. A l'instant même où l'on entrait, on ressentait un contentement exquis, comparable seulement à ces rares minutes où, alors qu'on est jeune et joyeux, on connaît le bonheur en ce monde. Toutes choses étaient belles en ce jardin...

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- Imagine-toi qu'il y avait là deux grandes panthères... oui, deux panthères tachetées... Et je n'avait pas peur... Ces fauves au pelage velouté jouait avec une balle, dans une allée spacieuse, entre deux longues plates-bandes fleuries à bordure de marbre. L'une des bêtes leva la tête et vint à moi, curieuse. Elle s'approcha, frotta son oreille ronde et douce contre la petite main que je tendis, et ronronna... C'était un jardin enchanté... Oui, certes !... Ses dimensions ? Il s'étendait très loin de tous côtés.

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"A l'instant même où la porte (du jardin) se referma derrière moi, j'oubliai la rue et les feuilles de marronnier, les cabs et les voitures de livraison.....

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Je revois encore son visage pâle et l'étrange lueur sombre qui dansait dans ses yeux. Je le revois très nettement ce soir, et je me rappelle chacun de ses mots, chacune de ses intonations... et le numéro d'hier de la Westminster Gazette, qui contient la nouvelle de sa mort, (la mort de Lionel Wallace) est resté déplié sur mon divan. Aujourd'hui, au club, tout le monde cherchait à résoudre l'énigme du destin de Wallace.
Hier, de grand matin, on a retrouvé son cadavre dans une profonde tranchée, près de la gare d'East Kensington. On avait creusé là deux puits pour les travaux de raccordement des lignes souterraines, une haute palissade de planches en défendait l'accès au public ; mais une petite porte y avait été ménagée pour livrer passage aux ouvriers. Cette porte, par suite de la négligence d'un chef d'équipe, n'avait pas été fermée, et c'est ainsi que Wallace pénétra dans le chantier...
Des questions sans réponses s'embrouillent dans mon esprit.
Il semble qu'avant-hier soir, à l'issue de la séance du Parlement, il avait voulu rentrer chez lui, à pied, ce qui lui arriva fréquemment pendant la récente session...

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Après tout, exista-t-il jamais en réalité une porte verte dans un mur blanc ? (Mur-Blanc, la ville de Ptah) Je l'ignore. J'ai relaté son histoire telle qu'il me la conta. A certains moments je suis convaincu que Wallace fut simplement la victime d'un genre d'hallucination rare, mais dont on a des exemples, et d'une coïncidence entre une de ses crises et une porte qui lui fut un piège fatal. Mais ce n'est pas là ma conviction la plus intime. Vous me jugerez superstitieux , si vous voulez, ou même absurde, mais je ne suis pas loin de croire qu'il était doué d'une faculté anormale, d'un sens, d'un je-ne-sais-quoi, qui, sous l'image d'une porte et d'un mur, lui offrait sans cesse une issue, un passage secret dans un monde infiniment plus beau que le nôtre. En tout cas, direz-vous, c'est de cette faculté merveilleuse qu'il fut finalement la victime. Mais en fut-il vraiment la victime ? Nous touchons là au caractère le plus mystérieux de ces rêveurs, de ces êtres de vision et d'imagination... Le monde pour nous a des couleurs banales, nous voyons la palissade et la tranchée comme des choses ordinaires. (Comme des adultes, alors qu'il faudrait regarder avec ses yeux d'enfants). Selon le jugement vulgaire, il passa de la sécurité dans les ténèbres, le péril et la mort. Mais vit-il les circonstances sous ce jour-là ? (Fin de la nouvelle)

Note : je n'hésite pas à parler de récit initiatique, dans le sens alchimique, à propos de cette nouvelle de H. G. Wells ; lequel a certainement lu des ouvrages d'anciens Adeptes......

Voir aussi la Porte des étoiles.